Le 22 mars 1832, Johann Wolfgang von Goethe décédait à Weimar.
Parmi son oeuvre immense, des romans, comme Les souffrances du jeune Werther, des pièces de théâtre, comme Faust… et Erlkönig, le Roi des Aulnes.
Erlkönig est mon poème préféré, toutes langues confondues. Un chef d’oeuvre de style, de rythme, d’émotion qui grandit au fil du dialogue entre le père et l’enfant fiévreux.
« Wer reitet so spät durch Nacht und Wind ? »
Qui galope si tard dans la nuit et le vent ?
Un père, prêt à tout pour sauver son enfant, qui délire et voit dans les ombres de la nuit le Roi des Aulnes lui apparaître, fantôme terrifiant et séducteur qui chuchote promesses et menaces à l’oreille du garçon.
Figure de l’adulte qui abuse face au père protecteur ou symbole de la sexualité adulte qui s’empare de l’âme et l’innocence de l’enfant pour le faire grandir ? Nombreuses ont été les interprétations au fil des décennies…
Je ne vois pour ma part que la terreur d’un enfant face à un fantôme et qui interpelle son père, l’appelant à l’aide « mein Vater, mein Vater ! » et face à ces angoisses, l’amour du père qui chercher à le rassurer, pousse sa monture au grand galop, pour arriver à temps chez lui…
Mais la chute arrive, splendide et tragique :
Dem Vater grauset’s, er reitet geschwind,
Er hält in Armen das ächzende Kind,
Erreicht den Hof mit Mühe und Not,
In seinen Armen das Kind war tot.
Qui chevauche aussi tard, dans la nuit et le vent,
C’est un père qui galope, emmenant son enfant,
Il protège son fils, bien au creux de ses bras,
Il veut le rassurer et le garder du froid.
Mon fils, pourquoi cacher tes yeux avec effroi ?
Père ne voyez-vous pas, des aulnes, là-bas, le Roi ?
Le Roi des Aulnes, portant couronne et beau brocard,
Mon cher fils je ne vois au loin que du brouillard.
« Toi, là, très cher enfant, viens donc et rejoins-moi !
Je ferai avec toi, de bien beaux jeux ma foi,
Sur la plage nous verrons de belles fleurs colorées,
Ma mère te montrera toutes ses robes dorées.
« Mon père, mon père, et là ? N’entendez-vous donc pas,
Les promesses que me fait le roi des Aulnes tout bas ?
Mon enfant, apaise-toi, reste ainsi calmement,
Tu n’entends que le chant des feuilles sèches dans le vent.
« Ne veux-tu pas, gentil garçon, venir chez moi ?
Mes filles te gâteront et prendront soin de toi,
Mes filles mènent la danse au plein cœur de la nuit,
Elles chanteront pour toi de douces mélodies.
Mon père, mon père et là ? Ne voyez-vous donc pas,
Les filles du Roi des Aulnes, dans ce coin sombre, là-bas ?
Mon cher fils, mon cher fils, je distingue vu d’ici,
Un bosquet de vieux saules qui paraissent bien gris.
« Je t’aime, ta beauté me fait entrer en transes,
Et si tu ne cèdes pas, j’userai de violence ! »
Mon cher père, mon cher père, voilà qu’il me saisit,
Le Roi des Aulnes me blesse et je souffre par lui.
En poussant sa monture, le père se sent frémir,
Et dans ses bras l’enfant ne cesse de gémir,
Angoissé, il arrive, à grand-peine, au foyer,
Mais au creux de ses bras, son fils est décédé.
(Traduction de Bibi, que vous lirez, j’espère, avec indulgence !)
Bonne journée !
Anne-Sophie
Bravo pour la traduction ! J’adore ce poème aussi, et le Lied … terrible.
Merci ! J’aime tellement, tellement ce poème…