Au fil de mes lectures

La partie de chasse – Isabel Colegate

Colegate« Cette histoire provoqua un petit scandale à l’époque, mais les événements qui suivirent eurent tôt fait de l’effacer de la plupart des mémoires. On pourrait la voir un peu comme un spectacle qui se déroulerait tout entier dans un salon éclairé par des lampes à huile et où, peut-être, brilleraient aussi sur les murs les lueurs mouvantes d’un grand feu de bûches. Dans cet immense salon édouardien, encombré de meubles et où les guéridons disparaissent sous les bibelots et les photographies encadrées, des gens conversent entre eux, les uns assis, les autres debout par petits groupes. Soudain, provenant de la pièce voisine, où personne n’a encore osé s’aventurer, arrive l’éclat violent d’une lumière électrique. S’engouffrant par la porte ouverte, cet éclairage rétrospectif et brutal plonge instantanément le salon dans la pénombre ; les flammes qui dansaient si joyeusement dans la cheminée s’estompent, les cercles de lumière jaune au pied des lampes perdent tout leur éclat (on dirait de l’or assourdi), et les êtres qui sont là, encore visibles malgré tout, nos parents, nos grands-parents, qui appartenaient déjà au passé, nous semblent reculer dans un passé encore plus éloigné, celui de Charlemagne et de ses chevaliers, celui des Sept Dormants à peine sortis de leur immense sommeil. »

Brillante description, n’est-ce pas, mes très chers rongeurs de bibliothèque ? On imaginerait presque assister à cette scène, et voir plonger d’un seul coup un monde entier dans les ténèbres du passé, cette société britannique aristocratique si brillante du début du XXe siècle, que la Première guerre mondiale va emporter comme un fétu de paille et qui vit dans ces années 1910 son chant du cygne. Lire la suite « La partie de chasse – Isabel Colegate »

Au fil de mes lectures

Passé imparfait – Julian Fellowes

Fellowes« Londres est désormais pour moi une ville hantée et je suis le fantôme qui erre dans ses rues. Chaque rue, chaque place, chaque avenue semble me susurrer les souvenirs d’une autre époque de mon existence. Même un tout petit tour à Chelsea ou Kensington me ramène à des endroits où je fus jadis bienvenu et où aujourd’hui je serais un parfait étranger.« 

Ecrit par le réalisateur de ma série fétiche, Downton Abbey, et auteur du roman Snobs que j’avais dévoré, Julian Fellowes, je ne pouvais passer à côté de Passé Imparfait. Tout dans le résumé m’attirait : un roman se déroulant en Angleterre, dans cette upper-class si propre à nos voisins d’Outre-Manche, avec une intrigue mêlant souvenirs qui remontent à la surface, liaisons amoureuses et satyre sociale d’une certaine société en voie de disparition. Lire la suite « Passé imparfait – Julian Fellowes »

About Jane·Au fil de mes lectures

Longbourn – Jo Baker

Baker« There could be no wearing of clothes without their laudering, just as surely as there could be no going without clothes, not in Hertfordshire anyway, and not in September. Washday could not be avoided, but the weekly purification of the household’s linen was nonetheless a dismal prospect for Sarah.« 

Ce qui, dans la langue de Molière, donnerait à peu près : « De même qu’il était impossible de se promener sans habits, de même on ne pouvait pas porter des habits sans les laver, en tout cas pas dans le Hertfordshire, et pas en septembre. Le jour de lessive ne pouvait pas être évité, mais le nettoyage hebdomadaire du linge de maison était néanmoins une perspective lugubre pour Sarah.« 

Figurez-vous, mes chères petites souris, que ce roman était sur ma liste-de-livres-à-acheter-puis-à-éparpiller-pour-que-Mari-Chéri-les-trouve-progressivement, quand, le premier jour des vacances, ma petite Maman me l’a offert comme cadeau souvenir de son voyage en Ecosse ! Top top top !

Imaginez donc : Orgueil et Préjugés narré du point de vue des domestiques, bref, Jane Austen à Dowton Abbey ! Lire la suite « Longbourn – Jo Baker »